Journal du voyage de Michel de Montaigne en Italie, par la Suisse et l’Allemagne, en 1580 et 1581
Par‐einsin, avoit duré mon voyage 17 mois 8 jours.
Michel de Montaigne
En 1580, après la première publication des Essais (ne comportant que les deux premiers livres), Montaigne entreprend un long voyage vers la Suisse, l’Allemagne et l’Italie, à des fins thérapeutiques, faisant haltes dans diverses villes thermales pour soigner ses coliques néphrétiques, et pour trouver du repos. Parti le 22 juin 1580 de son château de Montaigne (aujourd’hui sur la commune Saint‐Michel‐de‐Montaigne en Dordogne), il n’y revient que le 30 novembre 1581, « Le Jeudi, jour de St‐André, dernier Novambre ».
Ce Journal, qui n’a pas de prétention littéraire, est une succession de notes évoquant le parcours de ce voyage, en décrivant les étapes, présentant les symptômes de l’auteur des Essais… Les deux premières parties n’en ont pas été rédigées par Montaigne, mais sans doute par un secrétaire. Ce n’est qu’arrivé en Italie que Montaigne se saisit de la plume et le rédige par lui‐même, en italien. Il ne revient à la langue française qu’une fois de retour en France :
Ici on parle francés ; einsi je quite ce langage étrangier, duquel je me sers bien facilemant, mais bien mal assûréemant, n’aïant eu loisir, pour être tousiours en compaignie de françois, de faire nul apprentissage qui vaille.
Michel de Montaigne
Au début du mois de septembre 1581, alors qu’il est à Lucques (à côté de Pise), il reçoit une lettre l’informant qu’il a été nommé maire de Bordeaux. Montaigne organise donc son retour qui se fait sans précipitation. Après Lyon, Montaigne prend la direction de Clermont‐Ferrand où il dîne le dimanche 19 novembre. Il reprend la route le lendemain et ne mentionne le puy de Dôme que pour signaler l’évacuation d’un calcul rénal, « une pierre assés large & plate […] ni molle ni dure.». Il fait une halte à Pontgibaud où il rend une courte visite à « Madame de la Fayette » mais ni sa demeure ni le temps ne lui sont agréables. Il passe la nuit à Pontaumur, la dernière de ses étapes auvergnates avant de traverser le Limousin. Ainsi, il passe une nuit à Pont‐Sarrant (Pontcharraud?), envisageant non sans inquiétude le trajet jusqu’à Limoges, ponctué de « chetifves hostelleries », où le mauvais vin ne manque pas, sans parler du climat rude de l’hiver, « plus aspres qu’en lieu de France ». Longeant Felletin, il fait ensuite halte à « Chastein » (le Châtain du Monteil‐au‐Vicomte?), puis à Sauviat‐sur‐Vige avant d’atteindre Limoges, qu’il quitte le 26 novembre pour Les Cars, sa dernière étape limousine.