Le Château de Montbrun
Élie Berthet – 1847Avec Le Château de Montbrun, Élie Berthet signe un récit de chevalerie où les sentiments les plus nobles le disputent à l’éclat des assauts et des prouesses guerrières. Il met ainsi en scène, en pleine guerre de Cent Ans, l’opposition entre le vil seigneur de Montbrun, cherchant à s’approprier le château de Lastours au dépens de sa nièce Valérie, et le célèbre Bernard Duguesclin, illustre chevalier du roi de France, Charles V.
Si l’action se déroule presque exclusivement à Montbrun, que ce soit au château même, situé finalement à proximité de Châlus et de sa haute tour devant laquelle était venu mourir Richard Cœur‐de‐Lion, deux cents ans auparavant, ou dans ses environs, Élie Berthet nous mène également, brièvement, de Limoges au Château de Lastours, de Solignac au Chalard en passant par Nexon, mais guère au‐delà.
Parallèlement à l’intrigue guerrière, à l’opposition entre le baron de Montbrun et Bernard Duguesclin qui débouchera sur la prise du château par ce dernier, Élie Berthet dévide deux intrigues « familiales ». La première concerne le légitime héritier du château de Lastours, Guillaume, confié à la mort de ses parents à l’abbaye du Chalard, mise à sac peu de temps après par les Anglais. L’autre concerne le chef de la bande de routiers — soldats se mettant à la solde de l’un ou l’autre camp — s’attachant à défendre Valérie de Lastours et venant en aide à Duguesclin, le capitaine Bonne‐Lance, qui cherche à retrouver l’honneur perdu et la reconnaissance de son père.
Le prince de Galles...
Le prince de Galles, à qui son père, Édouard III, avait donné l’Aquitaine en toute souveraineté, venait de tirer une affreuse vengeance de Limoges ; cette ville, profitant de son absence, s’était rendue à Duguesclin et au duc de Berry. Le prince était malade à Angoulême de la maladie dont il mourut deux ans plus tard, lorsqu’il apprit cette défection. Quoiqu’il fût incapable de soutenir le poids de son armure, il réunit une puissante armée et vint mettre le…
Le château de Montbrun...
Le château de Montbrun (Mons brunus) était une de ces vieilles forteresses dont les ruines, encore imposantes, attestent seules aujourd’hui la puissance de certaines familles féodales, éteintes ou dispersées. Il s’élevait au centre d’une contrée montagneuse et couverte de bois. Les abords en étaient difficiles ; sa situation à l’extrêmité de gorges et de défilés presque impraticables, eût permis à une poignée d’hommes résolus et familiers avec tous les ac…
Il est vrai...
— Il est vrai, chevalier ; mais pour vous faire comprendre ce que j’exige, je dois vous dire à quel titre je tiens en ce moment le manoir de Lastours. Ce beau fief a passé dans ma famille du chef de mon épouse, dona Marguerite de Comborn, dame de Montbrun. Le dernier seigneur de Lastours, le baron Geoffroi, périt à la bataille de Poitiers, il y a quelque seize ou dix‐sept ans ; il laissait pour unique héritier en ligne directe un enfant de trois ans qu’on av…
Elle ne tarda pas...
Elle ne tarda pas à atteindre un escalier raide, étroit, conduisant au sommet de la tour Blanche. Sans hésiter, elle se mit à le gravir dans une obscurité complète.
Valérie se trouvait déjà à moitié de son ascension, quand son oreille fût frappée par une musique suave venant d’en haut. Elle s’arrêta pour respirer et écouta. Le troubadour chantait au sommet de la tour. Sa voix pure, bien timbrée se mariait au son d’une harpe. On ne pouvait à cette distanc…
Le Sermonneur...
Le Sermonneur lui imposa silence par un geste impérieux.
— Il y a quinze ou vingt ans, reprit‐il d’une voix grave, je ne me souviens pas au juste de la date, j’étais dans une compagnie de lances au service d’Édouard d’Angleterre et nous ravagions sans pitié les campagnes de Gascogne. A Angoulême, un espion vint dire à messire Jean Chandos, notre commandant, que la plupart des couvents du Limousin et du Périgord avaient caché leurs reliques et leurs trésor…